lundi 4 mai 2009

L'ANALYSE DE DIE MATY FALL

Tout d'abord une première remarque et elle porte la marque d'une déception: la réduction drastique de la taille du gouvernement n'est pas au rendez-vous malheureusement.
Tout d’abord, une première remarque et elle porte la marque d’une déception : le nouveau gouvernement compte 33 ministres contre 31 pour le gouvernement de Soumaré.


Les Sénégalais, enfoncés dans une crise sociale et économique très dure, s’attendaient à une réduction drastique de l’attelage gouvernemental et du train de vie de l’Etat. Il n’en est rien si l’on s’en tient à ce chiffre-là. Au contraire, il semble qu’il y a une inflation de ministres. Est-il impossible de faire tenir tous les équilibres régionaux, ethniques, religieux et politiques dans un chiffre en-deçà de vingt ministres ? Seuls ceux qui ont procédé à la formation de ce gouvernement peuvent répondre à cette question, eux qui ont été incapables de répondre à l’attente d’un gouvernement resserré exprimé par l’opinion publique. En effet, 33 ministres, c’est autant de budget, de dépenses sans exigence de résultats, d’argent jeté par la fenêtre, d’inflation de coûts de fonctionnement et de charges fixes. Les ménages sénégalais et les professions libérales savent ce qu’il en coûte de faire fonctionner une organisation privée comme publique. Et ce sont nos impôts, nos taxes et autres contributions volontaires imposées qui vont servir à faire marcher tout cela. En échange, on n’a jamais un ministre être obligé de donner des preuves de son efficacité ou de sa compétence. En revanche, quand il s’agit de dépenser l’argent du contribuable, personne ne se gêne parmi ces messieurs-dames du gouvernement : voyages en veux-tu-en-voilà, hôtels de luxe, tour du monde à courir les conférences internationales où nos ministres font de la figuration, séminaires à n’en plus finir, gaspillage à tous les étages.
Bon, on ne change pas une équipe de ministres d’Etat qui donne satisfaction au président de la République, qu’ils aient gagné aux élections locales du 22 mars 2009 ou pas.


Le critère de la victoire électorale ne s’applique pas en effet à Cheikh Tidiane Gadio, ministre des Affaires étrangères, qui ne fait pas de la politique de toute façon ou alors pas de manière affichée ni publique, ni à Cheikh Tidiane Sy et Me Madické Niang, qui ont été rasés en pleine campagne saint-louisienne par le jeune mais prometteur Cheikh Bamba Dièye de Benno Siggil Senegaal, non plus à Abdoulaye Diop, ratiboisé à Thiès, lui le ministre des Finances, le Premier ministre démissionnaire Hadjibou Soumaré et le domou Sokhna et ministre de l’Education Moustapha Sourang par Idrissa Seck, non plus à Khady Diop, dont le fief kaolackois a été largement remporté par ses adversaires aussi bien à la municipalité qu’au conseil régional où trônent deux responsables de Benno, ni at least à Karim Wade, dont les velléités de succession monarchique à la togolaise ont été étouffées dans l’œuf par le peuple sénégalais. Le critère de gain électoral ne peut en l’occurrence s’appliquer qu’à Oumar Sarr, qui a comme d’habitude, fait le plein de voix à Dagana dans le Walo, sauvant les meubles dans une région de Saint-Louis largement acquise à l’opposition avec la commune de Podor gagnée par Me Aïssata Tall Sall de Benno également.
Si ce n’est pas le critère électoral, les raisons de la satisfaction de Me Wade sont à chercher ailleurs. De son point de vue de Président autoritaire et volontaire, de chef de l’Etat doublé d’un chef de parti, d’hommes nuancé et à multiples facettes, il ne pouvait trouver meilleure binôme Intérieur-Justice que Cheikh Tidiane Sy et Me Madické Niang, qui sont des personnalités totalement acquises à sa cause. Depuis que Sy dirige la police de l’Etat, le fonctionnement de la sécurité et de la police s’en est trouvé amélioré parce qu’il a su bien s’entourer et mettre les policiers qu’il faut à leur place. C’est le cas notamment de la cruciale direction générale de la sûreté nationale, la DGSN, où le commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle Saliou Diallo fait un boulot extraordinaire. Pourtant, ce policier exceptionnel de professionnalisme et de rigueur était jusque là confiné au placard par des ministres qui ne connaissaient sans doute pas leur travail ou le faisaient mal. Avec Me Madické Niang à la justice, les affaires présidentielles sont bien gardées. Les dossiers gênants pour le Palais sont gérés au mieux des intérêts de Me Wade, de son régime et de son parti : affaire Hissène Habré, affaire des nervis, affaire Campbell Dieng et Karamoko Thioune, affaire El Malick Seck, affaire Idrissa Seck et les chantiers de Thiès, affaire du Joola et inculpation de personnalités sénégalaises, etc … Rien ne dépasse avec ce duo au service du Maître.


Abdoulaye Diop et Cheikh Tidiane Gadio, eux, ne gênent en rien les actions présidentielles au sens républicain, étatique et familial (sic) du terme. Au contraire, ils sont de bons techniciens, loin des péripéties du terrain politique mais non sans calculs, qui servent la vison et les projets de Me Wade, et qui l’aident à réaliser sa politique d’infrastructures, de chantiers et sa nouvelle diplomatie économique, en rupture avec ce qui se faisait jusqu’en 2000. Comme on dit en wolof, yakhou gnou fi dara. Leur longévité ministérielle est à l’aune de cet entregent pour la facilitation des projets du président de la République. Aussi longtemps que Me Wade sera au guidon, ils pourront toujours être là.


Ce n’est pas non plus la victoire qui explique le rappel de Ndèye Khady Diop au gouvernement après un passage à la Direction de la Petite enfance. Sans doute a-t-elle su convaincre Me Wade, son chef de parti, qu’elle ne portait aucune responsabilité dans la déroute électorale de Sopi 2009 à Kaolack. De plus, elle ne traîne aucune casserole jusqu’à plus ample informé.
Quant à Karim Wade, il est naturel que son Président de père lui donne le gros fromage qui lui a été attribué dans l’équipe de Souleymane Ndéné Ndiaye. Non seulement parce que c’est lui qui nomme aux postes les cadres, et pourquoi pas Karim puisqu’il est un cadre, mais aussi parce qu’il veut mettre fin à l’informalisation du statut de l’ancien président du conseil de surveillance de l’Anoci. Il était établi que Karim Wade était au centre de tout ce qui se décidait d’important dans l’Etat du Sénégal, notamment en matière économique, de télécommunications et d’infrastructures. Alors il était temps de mettre de l’ordre dans cette nébuleuse et de rendre public les fonctions de son fils pour que nul n’en ignore et que les rumeurs cessent à son propos. Par ailleurs, un opposant comme Ibrahima Sène du PIT soupçonne dans la nomination de Karim Wade au gouvernement la poursuite d’un agenda caché du chef de l’Etat, celui de se faire succéder par son fils. Qui vivra verra.


Djibô Kâ, lui, tout comme Abdourahim Agne, sont la caution de l’ouverture aux alliés non pas de l’intérieur comme la Cap 21 dirigée par Iba Der Thiam, mais aux alliés qui affaiblissent l’adversaire d’antan car ils sont des dissidents venus du Parti socialiste. C’est ainsi qu’il faut comprendre la politique de transhumance conceptualisée depuis le 19 mars 2000 au profit de la massification du PDS et de l’affaiblissement de l’ancien parti au pouvoir. Une politique qui a fait les beaux jours du parti de Me Wade, en dégarnissant les rangs du PS, mais qui est honnie et déconsidérée par les populations sénégalaises et l’opinion publique. C’est ainsi qu’il faut également comprendre le premier critère du choix de Sada Ndiaye, transhumant du Ps, comme ministre des Sénégalais de l’Extérieur. Le deuxième critère étant que Sada Ndiaye s’était porté volontaire, en 2008, pour endosser l’amendement qui a chassé Macky Sall de la tête de l’Assemblée nationale à l’issue d’un vote favorable et majoritaire du groupe libéral. C’est un geste de remerciement pour ce volontarisme. Le troisième critère de choix est que le profil sociologique de Sada Ndiaye colle parfaitement à la gueule de l’emploi. Il est beaucoup plus crédible à ce poste que l’ancienne titulaire dont le seul fait de gloire est un « Deug de pharmacie », par ailleurs inconnu dans la nomenclature des diplômes de la Faculté de Médecine. Quant à Aïda Mbodj, transhumante elle-aussi comme Sada Ndiaye et Abdourahim Agne, elle récolte les fruits de la victoire à Bambey où elle a écrasé ses adversaires grâce à un engagement et un volontarisme bien à elle.


A côte, il y a des retours en zone (RZ) comme ceux de Thierno Lô, Aliou Sow, Kouraïchi Thiam, Fatou Gaye Sarr et Ndèye khady Diop. On connait la décision prise par Aliou Sow, autrefois fidèle de Macky Sall, et auparavant de Modou Diagne Fada et d’Idrissa Seck, de se séparer sans tambour ni trompette de Macky Sall, une fois que le tribunal du Pds l’avait banni à la suite de Idy. Son retour au gouvernement pourrait ne pas être étranger à cette rupture opérée au bon moment, pour ne pas dire opportuniste. Ce retour met fin à une traversée du désert qui se faisait longue. Thierno Lô doit sans doute son retour au fait de récompenser la fidélité sans faille du professeur Iba Der Thiam à l’endroit de notre Président bien aimé. Il fait partie des militants de l’ex-parti de Thiam fondu dans le Pds. Kouraïchi Thiam tout comme Moustapha Guirassy, outre le fait qu’ils sont militants du Pds, sont également portés par la victoire inespérée du Pds à Kédougou et à Tambacounda, autrefois citadelles imprenables et jalousement gardées par le PS. Pour le moment, les raisons du retour de Fatou Gaye Sarr, éphémère ministre du temps des Fatou ministres-alibi de Me Wade, sont connues d’elle seule et de ses patrons.


De la nouveauté et de la jeunesse dans l’équipe de Souleymane Ndéné Ndiaye : avec Khadim Guèye, challenger de Aminata Tall à Diourbel et ancien directeur de la Sonacos, avant sa privatisation avec Suneor ; avec Ibrahima Cissé, assureur de profession mais inconnu au bataillon médiatique et politique ; avec Amadou Niang, directeur du Commerce ; avec Moustapha Guirassy, homme d’affaires venu du privé et fils d’un cacique du Parti socialiste, l’ancien président du conseil économique et social Mamba Guirassy ; avec Sada Ndiaye, bien connu en politique au Fouta, à la direction de la Sicap et du Coud, mais vierge en affaires gouvernementales ; avec Faustin Diatta, ingénieur, responsable politique à Oussouye, ancien directeur de la protection des végétaux ; avec Serigne Modou Bousso Lèye, inconnu au bataillon lui aussi ; avec Amadou Tidiane Bâ, recteur de l’université de Sédhiou ; avec Thérèse Coumba Diop, ingénieur des transports et directrice du centre Trainmar de Dakar qui compte politiquement à Joal où elle a fait équipe avec le maire reconduit Paul Ndong; Pape Ousmane Guèye, inspecteur principal des Douanes et inspecteur général d'Etat, né le 28 novembre 1958 à Sokone (département de Kaolack) remplace Fatou Diagne au Secrétariat général du gouvernement.


Quant aux ministres reconduits dans la nouvelle équipe, Habib Sy cède la place à Karim Wade aux infrastructures et aux transports aériens, Abdourahim Agne prend les attributions de Aziz Sow et cède ses anciennes attributions à Karim Wade, Djibo Kâ, Abdoulaye Diop, Cheikh Tidiane Gadio, Cheikh Tidiane Sy, Bécaye Diop, Me Madické Niang, Kalidou Diallo, Samuel Sarr, Oumou Khaïry Guèye Seck, Moussa Sakho, Moustapha Sourang, Mamadou Lamine Keïta et Abdoulaye Sow redoublent à leur ancien poste. Une petite précision s’impose cependant : Cheikh Tidiane Sy reprend les attributions de Ousmane Masseck Ndiaye avec les siennes propres, Habib Sy celles d’Innocence Ntap Ndiaye, Ndèye Khady Diop reprend les attributions d’Awa Ndiaye et de Farba Senghor, Kouraïchi Thiam celles de Souleymane Ndéné Ndiaye devenu Premier ministre, Fatou Gaye Sarr, celles d’Amath Sall, Serigne Bousso Lèye, celles de Mame Birame Diouf, Mamadou Lamine Keïta juxtapose les siennes avec celles de Bacar Dia, Faustin Diatta a une partie des anciennes attributions d’Aziz Sow tout comme Moustapha Guirassy, Ibrahima Cissé,reprend les attributions de Me Ousmane Ngom, Amadou Niang celles de Mamadou Diop Decroix et Thierno lô, une partie des attributions de Aminata Lô Dieng.


Nouveauté également dans les titres attribués. Aïda Mbodj hérite d’un ministère nouveau, dont la dénomination fait croire qu’il a été tout simplement créé pour elle pour servir de récompense. Thierno Lô a les relations avec le secteur privé et le secteur informel en plus de l’artisanat et du tourisme. Abdourahim Agne a les transports ferroviaires. Il faut bien parler des ministres démis même si leur quart d’heure de gloire est passé : Awa Ndiaye, Innocence Ntap Ndiaye, Aminata Lô Dieng, Ousmane Masseck Ndiaye, Me Ousmane Ngom, Amath Sall, Bacar Dia, Mamadou Diop Decroix, Mame Birame Diouf, Adama Sall, Christian Sina Diatta et Abdou Aziz Sow. Dans le cabinet du Président, trois ministres d’Etat ont été limogés aussi : Serigne Diop, Landing Savané et Abdoulaye Faye. Trente et un autres memebres du cabinet présidentiel ont aussi été remerciés sans qu'on sache pour le moment qui ils sont à part Me amadou Sall, son ancien porte-parole.Ils ont été démis pour cause de défaite électorale, de mauvaise gestion des investissements, de manque de résultats et de manière globale pour raison de rationalisation des coûts de gestion et des dépenses de la présidence de la République.


Cependant, si les membres de la nouvelle équipe, leurs familles, parents, amis, alliés et voisins sont contents et ravis pour eux, la question demeure : avons-nous les moyens de nous taper un gouvernement de 33 ministres ? De ce point de vue, c’est un échec. Mais gageons que le nouveau Premier ministre ne perdra plus son temps à répondre aux journalistes comme il l’a fait ce vendredi matin par rapport à l’analyse faite par Tamsir Jupiter Ndiaye de sa victoire à Guinguinéo. Le temps d’un PM est trop précieux et son traitement nous coûte trop cher pour qu’il ait le temps de se consacrer à la polémique et au tessanté.

Dié Maty FALL

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